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Le dirigeant du réseau de « social discovery » Tagged revient sur son business model et explique en quoi il se distingue de Facebook.

JDN. Comment est né Tagged ?

Greg Tseng. Nous avons lancé Tagged en octobre 2004 alors que les réseaux sociaux était encore naissants. A l’origine le service était destiné aux collégiens américains. En 2 ans, nous avons atteint près de 10% de pénétration sur cette cible. En 2006 et dans un contexte de lutte pour la place de numéro un avec d’autres réseaux sociaux tels que MySpace, Facebook, ou Bebo, nous avons ouvert nos inscriptions à tous les âges. Mais en 2007, nous avons fini par prendre conscience que nous ne gagnerons pas cette bataille et nous avons donc changé notre positionnement  pour devenir un réseau social dédié à la rencontre de nouvelles personnes. Basée à San Francisco, la société compte aujourd’hui près de 160 employés.

En quoi Tagged se distingue-t-il d’autres réseaux sociaux comme Facebook ?

Tagged est un réseau social spécialisé dans le « Social discovery » à l’instar de services comme Badoo. Nous avons réalisé ce pivot en 2007 après que plusieurs études internes nous aient montré qu’une majorité de nos utilisateurs utilisait en fait le service pour faire de nouvelles rencontres. Contrairement à Facebook où il s’agit de votre réseau d’amis existant, la plupart des contacts d’un utilisateur de Tagged provient de rencontres réalisées sur le site. Ces rencontres peuvent être amoureuses ou amicales et peuvent se faire à travers les jeux présents sur le site comme « Pets », qui est le plus connu.

Vous avez lancé Tagged quelques mois seulement après Facebook. Avec du recul, comment expliquez-vous le fait d’avoir perdu la bataille face à ce dernier ?

Je pense que les raisons sont à la fois liées au timing puisque nous avons lancé Tagged huit mois après Facebook, ainsi qu’à l’exécution. Facebook a su développer un meilleur service et ainsi créer un cercle vertueux qui lui a permis de comptabiliser d’avantage d’utilisateurs, de faire plus de buzz, d’attirer plus d’argent et donc de recruter des talents. Enfin, Facebook a su tirer son épingle du jeu en 2005 et 2006 en introduisant des innovations telles que le la possibilité de taguer des photos ou encore le flux d’actualité, deux éléments que nous n’avions pas à cette époque.

Nous sommes rentables depuis 5 ans

Combien d’utilisateurs comptez-vous et quels sont vos plus marchés les plus importants ?

En comptabilisant les utilisateurs de Tagged et d’Hi5 (racheté par Tagged en décembre 2011, ndlr), nous comptons près 20 millions d’utilisateurs actifs par mois et près de 300 millions d’inscrits dans plus de 200 pays. Notre plus grand marché reste les Etats-Unis suivi par le Mexique, l’Inde, la Thaïlande et le Pérou. En France nous comptons plus de 5 millions d’inscrits.

Sur quoi se base votre business model ?

Nous avons en fait trois sources de revenu différentes. La première est la publicité via la présence de bannières et de liens textuels sur notre site. Nous avons également développé notre propre monnaie virtuelle, appelée « Gold », qui permet d’acheter des objets virtuels ou de se promouvoir. La troisième repose sur nos abonnements premium, qui offrent l’accès à davantages de fonctionnalité,s comme par exemple de pouvoir afficher un label VIP sur sa photo de profil ou de pouvoir voir qui visite son profil. Alors qu’autrefois la publicité représentait la majorité de nos revenus, elle représente moins de la moitié désormais.

Etes-vous rentable?

Nous sommes en effet rentable depuis 2008 et cette année 2012 devrait être notre cinquième année consécutive de rentabilité.

Les jeux présents sur le site semblent tous être développés en interne. Pourquoi ne pas ouvrir la plateforme à d’autres développeurs comme le fait Facebook avec Zynga ?

Nous développons en effet l’ensemble de nos jeux et notamment « Pets » que nous gérons en interne. Je ne pense pas que nous ayons encore assez de trafic pour pouvoir nous développer en tant que plateforme. Une fois que nous atteindrons les cinquante millions d’utilisateurs actifs par mois, cela pourrait devenir une possibilité. Mais ce n’est pas d’actualité.

Vous avez racheté le réseau social Hi5 en décembre 2011, pourquoi avoir choisi de conserver le service séparément de Tagged plutôt que de l’intégrer à celui-ci ?

Nous avons en fait déjà transformé les services Hi5 en services Tagged. En effet, si vous utilisez Hi5 vous aurez ainsi la sensation d’utiliser Tagged avec un logo différent. Nous avons également fusionné les bases de données afin que les utilisateurs des deux plateformes puissent s’y connecter avec des identifiants identiques. Après avoir effectué tous ces changements, il nous est apparu que changer la marque Hi5 aurait été un changement trop important pour les utilisateurs, nous l’avons donc laissé.

Une IPO ? Nous pensons à beaucoup de choses…

En 2009, vous avez reçu plusieurs plaintes de la part d’utilisateurs concernant l’envoi d’invitations non-désirées, quelle est aujourd’hui votre politique en la matière ?

En juin 2009, nous avions mis en place un nouveau procédé de partage qui s’est révélé mauvais puisque certains de nos utilisateurs ont, sans le vouloir, envoyé des invitations à plusieurs de leurs contacts e-mail. Ces contacts pouvaient ainsi se révéler être d’anciens petits amis, patrons, ou encore médecins. Certains utilisateurs mécontents nous en ont donc voulu mais dès que nous avons pris connaissance du problème, c’est-à-dire trois jours après, nous avons bien retiré cette option de partage. Depuis, nous avons ajouté plusieurs étapes de paramétrage afin d’éviter toute confusion à nos utilisateurs.

Quel regard portez-vous sur l’IPO ratée de Facebook ? Des rumeurs évoquent une IPO de Tagged en 2013, est-ce toujours d’actualité ?

Il faut admettre que les ratés de l’IPO de Facebook étaient vraiment inattendus. Mais je pense que Mark Zuckerberg s’intéresse plus à bâtir un projet sur le long terme qu’à la valeur de ses actions en bourse. Le service continue à se développer et vient de dépasser le milliard d’utilisateurs. A mon sens, tant qu’une société reste fidèle à sa vocation, à ses produits et à ses utilisateurs, le reste, comme le prix des actions, est amené à suivre.

Concernant Tagged, je vais simplement vous répondre que nous pensons à beaucoup de choses mais je ne peux rien dire de plus à ce sujet. Nous restons avant tout concentrés sur notre mission qui est d’aider à découvrir et interagir avec de nouvelles personnes.

Comment voyez-vous le futur de Tagged ?

Nous allons bien entendu continuer à développer les possibilités offertes par le Social Discovery. Comme beaucoup d’autres sociétés du web, nous axons notre développement sur le mobile sur lequel nous sommes en train de basculer. Déjà près d’un tiers de nos utilisateurs actifs journaliers se connectent à Tagged via un mobile et nous pensons que cette minorité représentera très bientôt la majorité de nos utilisateurs.

Devenir manager d’une équipe

Greg Tseng est encore étudiant à Harvard lorsqu’il cofonde en 1999 Avivon, la société à l’origine du comparateur d’achat Flyingchickens.com. Pendant sa scolarité, Greg Tseng dirige le Harvard Entrepreneurs Club (HEC) pendant deux ans. Après avoir été diplômé en physique-mathématiques de l’Université de Harvard, il cofonde en 2004 le réseau social Tagged, dont il est aujourd’hui encore le CEO. Il prépare actuellement une thèse à l’Université de Stanford où ses travaux de recherche portent essentiellement dans le domaine des nanotechnologies.

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